top of page

Piste cyclable du boulevard Malesherbes : un autre chemin était possible... encore eût-il fallu le vouloir !


Piste cyclable du boulevard Malesherbes : un autre chemin était possible... encore eût-il fallu le vouloir !

Dès septembre 2023 et la présentation du projet, je m'étais mobilisée pour rééquilibrer l'aménagement de la piste cyclable du boulevard Malesherbes, y compris au moyen d'une pétition en ligne. Toutes les places de stationnement latérales (200) devaient en effet être supprimées alors que cette suppression n'était pas strictement nécessaire, adaptée et proportionnée aux besoins de l'aménagement. J'avais alors proposé 1/ de conserver des places de stationnement sur la bande technique prévue pour les zones de livraison, le stationnement des personnes handicapées et les taxis ; 2/ de développer une offre alternative de places de stationnement résidentiel - en surface et en souterrain - à proximité immédiate du boulevard Malesherbes ; et 3/ de garantir la possibilité de s'arrêter brièvement au droit de chez soi pour décharger son véhicule.

Une cinquantaine de riverains avaient également pris l'initiative d'attaquer en justice l'arrêté autorisant le permis d'aménagement n°PA 075 108 23 V0010 du 9 octobre 2023, délivré à la Ville de Paris "pour l'aménagement de pistes cyclables unidirectionnelles sur le boulevard Malesherbes", invoquant principalement des moyens procéduraux - le Préfet de police de Paris n'avait pas été consulté, une enquête publique n'avait pas été préalablement diligentée, etc.

Lors du Conseil du 8e arrondissement du 6 novembre 2023, pour expliquer son rejet de mon vœu sur l'indispensable rééquilibrage du projet initial d'aménagement de la piste cyclable du boulevard Malesherbes, la Maire du 8e arrondissement, après avoir émis le 19 septembre un "avis favorable" sans la moindre réserve sur le projet, avait reconnu qu'elle ne se mobiliserait pas pour l'améliorer car elle ne voulait pas "perdre du temps" aux prises avec une Mairie de Paris qui lui objecte régulièrement qu'elle a été élue sur un programme et qu'elle compte bien l'appliquer (voir ci-dessous l'extrait de la page 33 du compte rendu du Conseil du 8e arrondissement du 6 novembre 2023).


 

La Maire du 8e arrondissement avait émis dès le 19 septembre un "avis favorable", sans la moindre réserve, sur le projet d'aménagement.
La Maire du 8e arrondissement avait émis dès le 19 septembre un "avis favorable", sans la moindre réserve, sur le projet d'aménagement.

 
Extrait du compte rendu du Conseil du 8e arrondissement du 6 novembre 2023 (p. 33).
Extrait du compte rendu du Conseil du 8e arrondissement du 6 novembre 2023 (p. 33).
 



 


 



 

Sommaire


 

Un exemple de mobilisation réussie : le Maire du 16e arrondissement

Heureusement pour les Parisiens et la droite parisienne, tous les Maires d'arrondissements ne se résignent pas d'emblée devant la difficulté. Le nouveau Maire du 16e arrondissement a par exemple obtenu des améliorations significatives pour l'aménagement des pistes cyclables sur l'avenue Paul Doumer.

La situation de la Mairie du 16e arrondissement concernant l'avenue Paul Doumer était semblable à celle de la Mairie du 8e arrondissement concernant le boulevard Malesherbes. En novembre 2023, elle a été informée du projet de création de deux pistes cyclables avenue Paul Doumer, un projet également "imposé sans concertation" par la Maire de Paris. Ce projet prévoyait lui aussi la suppression de l'intégralité des places de stationnement latérales sur les deux côtés de l'avenue, en l'occurrence 150 places.

Mais la réaction du Maire du 16e arrondissement fut à l'opposé de celle de la Maire du 8e arrondissement. Il prit immédiatement l'initiative d'organiser une réunion publique dédiée en Mairie pour ouvrir le débat, confronter et faire dialoguer les points de vue. Puis il plaida et défendit les intérêts des riverains et des commerçants, pendant "des semaines de négociations".


Bien sûr, un combat politique peut être perdu... Mais c'est le combat qui n'est pas livré qui est d'ores et déjà perdu !

Le résultat est probant : il a finalement obtenu "la conservation de 50% des places de stationnement payant, la préservation des zones de livraison, la création de nouvelles places GIG-GIC sur l'avenue Paul Doumer et dans les rues alentour". Fort de ce succès, il peut exiger de la Mairie de Paris qu'à l'avenir tout projet fasse l'objet d'une véritable concertation préalable pour que les deux Mairies se mettent d'accord sur l'essentiel, au plus près d'une conception partagée de l'intérêt général.


 

L'article de Paris XVI Mag rendant compte des améliorations obtenues par le Maire du 16e arrondissement pour l'aménagement des pistes cyclables avenue Paul Doumer.
L'article de Paris XVI Mag rendant compte des améliorations obtenues par le Maire du 16e arrondissement pour l'aménagement des pistes cyclables avenue Paul Doumer.

 

L'immobilisme fautif de la Mairie du 8e arrondissement

Au contraire, la Maire du 8e arrondissement n'a pas obtenu la moindre amélioration sur le projet d''aménagement de la piste cyclable du boulevard Malesherbes. Certains riverains ont même eu la désagréable surprise d'être verbalisés alors qu'ils étaient en train de décharger leur véhicule au droit de leur domicile et qu'ils étaient pourvus du disque bleu ad hoc. Par sa passivité, la Maire du 8e a confirmé un dangereux précédent : en n'opposant - à nouveau - aucune résistance à la volonté de la Mairie de Paris, elle encourage cette dernière à poursuivre dans le 8e arrondissement ses aménagements de voirie "100% idéologiques - 0% concertation", lesquels reviennent à dresser les différents usagers de l'espace public les uns contre les autres. Ceci explique probablement que près de 300 places de stationnement aient d'ores et déjà été supprimées sans coup férir par l'Hôtel de Ville depuis 2020 dans le 8e...


Chaque aménagement de l'espace public devrait préserver un équilibre entre les intérêts de ses différents usagers. Nul ne devrait oublier que nous sommes tous, tour à tour, dans une situation d'automobiliste, de cycliste et de piéton ; dans une situation de mobilité de destination et dans une situation de mobilité de transit ; dans une situation de validité et d'invalidité.

La passivité de la Mairie du 8e arrondissement à l'égard des projets d'aménagement de l'espace public portés par la Mairie de Paris est emblématique d'une erreur manifeste d'appréciation du rôle attendu de la part d'un Maire de droite dans la capitale de Mme HIDALGO. L'organisation politique et administrative parisienne emporte plusieurs conséquences. Premièrement, c'est la Mairie de Paris qui dispose du pouvoir juridique de décision, les Mairies d'arrondissement ne disposant, dans la plupart des domaines, que d'un simple pouvoir politique d'avis et d'influence. Deuxièmement, les services administratifs déconcentrés dans les arrondissements se trouvent sous l'autorité hiérarchique et fonctionnelle de la seule Mairie de Paris, non de celle des Mairies d'arrondissement. Dans ces conditions, pour faire connaître et valoir les intérêts des habitants dans la mise en œuvre des politiques municipales, les Mairies d'arrondissement doivent, certes, collaborer avec la Mairie de Paris. Mais cette collaboration doit s'arrêter là même où commence la trahison des intérêts des habitants et du mandat des électeurs.

Pour cela, les Maires d'arrondissement doivent actionner tous les leviers à leur disposition pour optimiser leur pouvoir politique d'avis et d'influence, à défaut de disposer d'un pouvoir juridique de décision : vœux, questions, courriers, rendez-vous, interpellations publiques, presse, etc. C'est précisément parce qu'ils ont peu de pouvoir qu'ils doivent s'en emparer pleinement et l'exercer au maximum, en faisant feu de tout bois. C'est le rôle d'un opposant de collaborer dès que possible mais de s'opposer chaque fois que nécessaire pour être en capacité de proposer un chemin alternatif et préférable.


Engager la responsabilité de la Maire de Paris ?

Une lueur d'espoir pourrait vaciller du côté de l'engagement de la responsabilité civile des Maires. Pierre-Yves GAUTIER, Professeur à l'Université Paris-Panthéon-Assas, et Christophe PERCHET, avocat à la Cour, ont récemment publié dans la revue professionnelle Recueil Dalloz un article titré "Des conditions de la responsabilité civile d'un édile, à la lumière du Bien commun". A la question de savoir si la responsabilité civile d'un Maire peut être engagée à titre personnel dans le cadre de la mise en oeuvre d'une politique municipale, les auteurs considèrent qu'il est légitime de "s'interroger sur la radicalité des moyens mis en oeuvre et les dommages qu'elle cause à une partie de la population", dans le cas d'espèce d'une politique favorable aux transports en commun et au vélo, "celle qui subit ses effets délétères sur le trafic, comme celle victime du manque de discipline de trop nombreux cyclistes, qui se pensent à l'abri de toute sanction".

Ainsi pourrait-il en résulter un dommage moral, que les auteurs qualifient de "préjudice d'anxiété" ou "d'angoisse", dont le fait générateur serait l'exercice par l'édile de ses prérogatives "de manière insuffisamment réfléchie, sans se soucier des conditions de vie qui en résultent pour la population". Et les auteurs de rappeler : "le droit est conçu pour le service et la protection de tous, et non au bénéfice de l’idéologie de celui qui les commande, fût-il persuadé d’avoir raison, ou d’une partie de la population qu’il entendrait favoriser".

Le raisonnement de ces juristes rejoint l'idée rappelée ci-dessus que je développe régulièrement : tout aménagement de l'espace public devrait respecter un équilibre entre les intérêts de ses différents usagers ; dans cette perspective, tout aménagement qui n'est pas strictement nécessaire, adapté et proportionné aux besoins d'un projet pourrait ipso facto justifier l'engagement de la responsabilité civile de son décideur politique.


 


1 Comment


francoise
Jun 27

Je vous remercie pour cette analyse que j’apprécie à 100%.

En tant que piéton j’en me sens pas du tout en sécurité. Les piétons sont sacrifiés au profit des cyclistes. Ceux ci ne respectent pas le code de la route et malgré toutes ces pistes circulent sur le trottoir. Mais où est la Police municipale?

Bien cordialement

Like
bottom of page