Lettre ouverte à la Maire de Paris | Pour que la magie de Guignol renaisse sur la plus belle avenue du monde
- Catherine Lécuyer
- il y a 5 jours
- 3 min de lecture

LETTRE OUVERTE - Catherine LÉCUYER, Alexandre JARDIN, Jean-François LEGARET et Alain MALRAUX appellent la Maire de Paris a redonner au théâtre de Guignol les moyens d'exister pour transmettre "la joie simple du spectacle vivant, l'émotion d'un moment partagé, la magie d'un rideau qui se lève".
Madame la Maire,
Il existe à Paris, niché dans un recoin des jardins des Champs-Élysées, un lieu modeste en apparence, mais infiniment précieux pour la mémoire collective des Parisiens : le théâtre de Guignol des Champs-Élysées.
Ce petit théâtre de plein air, à deux pas de la place de la Concorde, du rond-point des Champs-Élysées et de l’Arc de Triomphe, n’a ni le classement patrimonial ni les fastes des grands monuments. Et pourtant, il est de ces petits joyaux discrets, joyeux, enracinés dans la tradition populaire parisienne que l’on n’a pas le droit de laisser disparaître.
Il est de ces petits joyaux discrets, joyeux, enracinés dans la tradition populaire parisienne que l'on n'a pas le droit de laisser disparaître.
Car ce théâtre a vu défiler des générations de jeunes enfants sur ses bancs de bois depuis… 1818 ! Il a éveillé des rires, suscité des émotions et transmis, à sa manière, une part de la culture populaire française. Guignol, ce personnage facétieux né au XIXe siècle, n’est pas qu’un divertissement pour enfants : il est un héritage, un trait d’union entre les âges, un théâtre populaire au sens noble du terme.
Aujourd’hui, ce lieu s’efface doucement, à l’ombre des grands projets urbains et des priorités patrimoniales, sans que personne ou presque ne s’en émeuve. Les monuments célèbres bénéficient, à juste titre, de la vigilance d’amoureux du patrimoine, d’institutions et de mécènes. Le théâtre de Guignol, lui, n’a pour protecteurs que ceux qui s’en souviennent encore.
Or le sort de ce théâtre n’est pas anecdotique. Chaque lieu, aussi modeste soit-il, participe à l’identité sensible d’une ville. Il est un révélateur : il montre ce qu’on perd, à force de vouloir réinventer Paris sans ses Parisiens. Le renoncement à ces petits lieux du quotidien affaiblit plus sûrement l’âme de la capitale qu’on ne veut bien le croire.
Ce n’est pas seulement un rideau qui tombe. C’est une part de notre mémoire qui s’efface, doucement, silencieusement. Un Paris sans Guignol, c’est un Paris qui oublie ce qu’il est. Restaurer ce théâtre, c’est refuser cette amnésie organisée. C’est offrir un sursaut.
Un Paris sans Guignol, c'est un Paris qui oublie ce qu'il est. Restaurer ce théâtre, c'est refuser une amnésie organisée. C'est offrir un sursaut.
Nous vous écrivons aujourd’hui pour que ce théâtre ne disparaisse pas dans l’indifférence. Pour qu’il soit reconnu comme un élément vivant du patrimoine parisien. Pour qu’il retrouve un souffle, une programmation, une attention municipale.
Sauver ce théâtre, ce n’est pas seulement restaurer quelques planches. C’est préserver un lien entre Paris et ses habitants. C’est transmettre à nos enfants ce que d’autres enfants, avant eux, ont reçu en héritage : la joie simple du spectacle vivant, l’émotion d’un moment partagé, la magie d’un rideau qui se lève.
Nous vous demandons, Madame la Maire, de ne pas laisser mourir cette scène discrète. De lui redonner les moyens d’exister. Et de permettre à Guignol, encore et toujours, de faire rire les enfants de Paris et d'ailleurs.
Signataires :
Catherine LÉCUYER, conseillère du 8e arrondissement de Paris
Alexandre JARDIN, écrivain et habitant du 8e arrondissement
Jean-François LEGARET, président de la Commission du vieux Paris
Alain MALRAUX, homme de lettres, dramaturge, traducteur et habitant du 8e arrondissement