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Point de vue | Changeons de mode de scrutin à Paris pour plus de démocratie et moins de clientélisme dans la capitale


La réforme du mode de scrutin répondra à un triple enjeu de clarté démocratique, de légitimité du Maire de Paris et d'égalité des citoyens.
La réforme du mode de scrutin répondra à un triple enjeu de clarté démocratique, de légitimité du Maire de Paris et d'égalité des citoyens.

La proposition de loi déposée le 15 octobre dernier par quatre députés de Paris - dont Sylvain MAILLARD - pour réformer le mode de scrutin dans la capitale pourrait finalement être examinée et adoptée d'ici l'été. Comme le font tous les six ans près de 40 millions d'électeurs dans plus de 34 000 communes françaises, les électeurs parisiens pourront alors élire directement - dès 2026 - leurs conseillers municipaux dans une circonscription territoriale unique et non arrondissement par arrondissement. Je soutiens cette réforme. Voici brièvement pourquoi.


Le mode de scrutin pour les élections municipales à Paris est unique en France : les électeurs n'élisent pas directement le Conseil municipal ou Conseil de Paris (qui élit ensuite le Maire) dans une circonscription territoriale unique ; ils élisent au niveau de l'arrondissement ou du secteur les Conseillers d'arrondissement qui composent ensuite une partie du Conseil de Paris (qui élit enfin le Maire). La composition du Conseil de Paris est donc déterminée par les Conseillers d'arrondissement alors que dans les autres communes de France les électeurs choisissent directement la composition de leur Conseil municipal. L'élection du Maire de Paris s'effectue ainsi au terme d'un "double" scrutin indirect, alors qu'il est élu partout ailleurs au terme d'un "simple" scrutin indirect. Pour en savoir plus, voir mon précédent post à ce sujet.

Logique territoriale v. logique démocratique

En créant des élus d'arrondissement et des secteurs électoraux dans la loi "Paris - Lyon - Marseille" de 1982, le législateur avait privilégié une logique territoriale sur une logique démocratique. Il en a résulté des distorsions territoriales de la démocratie locale. Première distorsion territoriale : un Maire de Paris peut être élu en étant minoritaire en voix et / ou minoritaire en arrondissements remportés. En 2020, il suffisait par exemple qu’un candidat récolte 50,01 % des voix dans les 10e, 13e, 14e, 15e, 16e, 18e, 19e et 20e arrondissements (soit 8 arrondissements sur 20), sans obtenir la moindre voix dans les 12 autres arrondissements, pour obtenir une majorité absolue de 82 des 163 sièges du Conseil de Paris et se faire élire Maire avec seulement 31 % des suffrages exprimés sur l’ensemble de la ville, comme l'avait démontré un député dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi en 2020. Le mode de scrutin actuel favorise dès lors les campagnes électorales fondées sur une stratégie de sectorisation et de mobilisation d'une géographie et d'un camp, avec des arrondissements "à mobiliser", d'autres "à basculer", d'autres encore "à délaisser", suivant qu'ils sont plus ou moins favorables aux candidats.

Seconde distorsion territoriale : les citoyens n'ont pas tous "la même voix au chapitre" électoral. La voix d'un Parisien qui vote pour la liste perdante d'un arrondissement sera peu ou pas représentée au Conseil de Paris. Elle est "perdue". C'est l'exemple classique de l'électeur de gauche dans le 8e arrondissement ou de l'électeur de droite dans le 20e arrondissement, lesquels peuvent légitimement s'interroger sur leur représentation. L'intérêt à voter étant moindre pour ces électeurs "localement minoritaires", un effet démobilisateur entraîne une abstention plus élevée que la moyenne pour les élections municipales.


Clarté, légitimité, égalité

Si la réforme est adoptée, l'attribution des sièges au Conseil de Paris ne sera plus déterminée au niveau de l'arrondissement mais au niveau de la ville dans une circonscription territoriale unique, de sorte que la composition du conseil municipal reflétera mieux la volonté des électeurs de toute la commune et non la seule volonté des électeurs de certains secteurs "clefs". Concrètement, l'élection du Conseil de Paris et les élections des Conseils d'arrondissement seront distinguées. Les électeurs parisiens voteront 2 fois le même jour, avec 2 urnes et 2 bulletins, pour élire leurs Conseillers de Paris et pour élire leurs Conseillers d'arrondissement.

"Municipaliser" ainsi le scrutin dans une circonscription territoriale unique répondra à un triple enjeu de clarté démocratique, de légitimité du Maire de Paris et d'égalité des citoyens. Un candidat à la Mairie de Paris devra s'efforcer de convaincre une majorité des Parisiens, en toute transparence, plutôt qu'une majorité des Conseillers de Paris, dans une certaine opacité. "Découpler" les votes pour le Conseil d'arrondissement et pour le Conseil de Paris permettra aussi de panacher la continuité et la rupture : lors du même scrutin, il deviendra possible de voter pour le changement à l'un des deux niveaux, l'arrondissement ou la capitale, et au contraire pour la permanence à l'autre.


Vous vivez à Paris ? Votez à Paris ! Propreté, circulation, sécurité, finances, fiscalité, logement, patrimoine… : en mars 2026, les élections municipales désigneront pour 6 ans les élus en charge du quotidien de Paris et des Parisiens. Alors que chaque voix comptera pour mettre un terme à plus de 25 ans de gauchisme municipal, de nombreux Parisiens de droite sont électeurs en province, dans une ville ou un village où ils ont certes des attaches mais où ils n'habitent pas. En mars 2026, demandez-vous où votre vote sera le plus utile pour votre cadre et votre qualité de vie quotidienne. Ne laissez personne décider à votre place de votre vie de tous les jours. Vous pouvez vous inscrire sur les listes électorales parisiennes par internet, auprès de l'une des 17 Mairies d'arrondissement (quel que soit votre arrondissement de domicile) ou par courrier.

Transférer des compétences de proximité

Afin d'équilibrer les effets potentiellement "centripètes" de cette réforme du mode de scrutin, il faudra réviser plus largement le statut de Paris pour améliorer la répartition des compétences entre la Mairie de Paris et les Mairies d'arrondissement en transférant des compétences de proximité de la première aux secondes. L'arrondissement a en effet vocation à être l'échelon de référence des compétences en matière de propreté, de voirie, d'urbanisme et de logement social.

Il faut renforcer le rôle des Maires d'arrondissement parce qu'ils sont les décideurs de proximité ayant la connaissance la plus fine du territoire et des besoins de leur arrondissement. Sans aller jusqu'à l'attribution d'une personnalité morale aux arrondissements, l'exercice de ces nouvelles compétences pourra s'effectuer par des avis conformes ou par des délégations obligatoires de compétences.


Gauche et clientélisme

Si l'issue de l'élection municipale à Paris est in fine moins déterminée par le mode de scrutin que par la dynamique politique, les opposants à la réforme n'en auront pas moins beau jeu de dénoncer ad nauseam un "tripatouillage électoral" en arguant que le projet intervient à moins d'un an de l'échéance.

La Maire de Paris et les prétendants à sa succession à gauche ont d'ores et déjà manifesté leur opposition à toute évolution du mode de scrutin dans la capitale. C'est dans leur intérêt électoral bien compris. Pratiquant de longue date une politique de population clientéliste dans les arrondissements de la capitale décisifs pour son maintien au pouvoir, la gauche fait semblant de ne pas voir le problème démocratique du déficit de représentativité du Conseil de Paris. C'est l'ultime raison de soutenir cette réforme du mode de scrutin : mettre un terme à un quart de siècle de clientélisme politique éhonté de la gauche dans la capitale.

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